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Phebus
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Un roman peut en cacher un autre.
Comme chez Hitchcock - qui souvent s'inspira de l'oeuvre de Daphné Du Maurier - nous nous trouvons d'abord lancés sur une fausse piste : meurtre crapuleux dans la Rome de l'après-guerre. A moins que cette fausse piste elle-même... Armino, témoin bouleversé de l'affaire, décide de laisser tomber son job - guide pour touristes - et va se mettre au vert dans la petite ville dont il est originaire, aux confins de la Toscane, des Marches et de l'Ombrie.
Le passé, espère-t-il, aura là-bas un autre goût : celui de la glorieuse Italie des ducs de Ruffano, qui ont laissé nombre de monuments dans la petite cité, et quelques légendes insistantes - parmi lesquelles celle du duc Claudio, dit le Faucon, un orgueilleux mort cinq siècles plus tôt, précipité de la plus haute tour de son palais alors qu'il essayait de s'envoler dans les airs. Passé et présent ont tendance, en de tels lieux, à confondre leurs rôles.
Armino croit reconnaître en Aldo, l'agitateur culturel local, son frère aîné porté disparu pendant la guerre. Entre eux vont renaître les jeux cruels d'autrefois, où les femmes désormais auront un trouble rôle à jouer. Quel secret se cache derrière la porte si bien cadenassée de cette enfance qui refuse de mourir ? Pour l'avoir débusqué, Aldo un jour, devant la ville en fête, va se risquer à monter lui aussi l'escalier de la tour...
Comme dans Le Bouc émissaire, auquel on l'a comparé, Daphné Du Maurier joue au long de ce romain sur le double registre du vertige et des intermittences de la mémoire. La guerre là encore n'est pas loin, et la vie a du mal à faire la paix avec elle-même, empoisonnée par quelques méchants secrets de famille. Invite à aller fouiller de l'autre côté des apparences : en ces obscurs retraits où l'Histoire de Secrètement rendez-vous à l'histoire de chacun.
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Le monde infernal de Branwell Bronté
Daphné Du maurier
- Phébus
- D'aujourd'hui Etranger
- 9 Mars 2006
- 9782752901637
Le secret des soeurs Brontë ? - leur frère Branwell (absent - effacé - sur le fameux tableau peint par lui et qui les représente tous les quatre). La clé de leur précocité inouïe, de leur imaginaire étrangement porté vers toutes les fièvres : Branwell encore. Leur secret : l'amour que toutes ne cesseront de vouer à ce frère maudit qui leur avait insufflé son génie et qui, parvenu à l'âge adulte et ayant depuis belle lurette brûlé toutes ses cartouches, n'eut plus que la force de se détruire (Heathcliff, l'inoubliable Heathcliff des Hauts de Hurlevent, c'est lui).
L'ouvrage de Daphné Du Maurier (1960), qui est à la fois une étude formidablement documentée est le plus troublant des romans vrais - le roman de l'Absence -, introuvable depuis des lustres, est considéré dans le monde entier comme une sorte de livre-culte. C'est en effet dans ces pages que se trouvent révélés, comme nulle part ailleurs sans doute, à la fois la clé du personnage fascinant de Heathcliff et le secret quasi-incestueux des trois soeurs- qui ne devinrent romancières que parce que c'était pour elles, en quelque manière, la seule façon de faire l'amour à ce frère trop aimé : de le mettre amoureusement à mort.
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C'est le grand roman " irlandais " de Daphné Du Maurier, qui toujours revendiqua un intérêt passionné pour le versant celte de la culture anglo-saxonne.
A travers l'histoire d'une famille de hobereaux installés depuis deux cents ans dans la verte Erin et y prospérant au point de s'y sentir chez soi, c'est un peu la chronique d'une illusion qui nous est ici contée : illusion commune à tous ceux qui croient posséder, réussir et qui s'aperçoivent un jour que le bel édifice à la construction duquel ils ont consacré tant d'énergie n'était qu'un château promis à ruine.
Ainsi allons-nous suivre en leurs tribulations quatre générations de Brodrick, fièrement attachés à leur manoir, à leur domaine - et à la mine de cuivre qui passe pour en être le fleuron.
Comme toujours chez la sauvage Daphné, l'attente vertueuse de ceux qui se vouent par principe à la respectabilité se trouve déjouée par quelques brebis galeuses - ou simplement distraites.
Car l'histoire se moque bien de récompenser la vertu comme de punir le crime ; il lui suffit de laisser carrière à la folie des hommes, si pleine de ressources. Peu après le début de ce siècle, la violence d'un conflit mondial que personne semble-t-il n'a vu venir brouille une fois de plus les cartes ; la guerre civile éclate alors dans l'île, rappelant au monde que l'Irlande est aussi peuplée d'Irlandais...
Façon surtout, pour la romancière, de revenir à cette idée qui lui est chère : que les hommes, d'où qu'ils viennent, sont toujours et partout les enfants du bruit et de la fureur.
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Où Daphné Du Maurier revisite, par la voie du roman, l'histoire d'une famille qui ne fut pas de tout repos : celle de ses ancêtres français.
Une modeste demeure du Perche à la fin du XVIIIe siècle. On y est souffleur de verre de père en fils, et l'on s'en targue (la profession est quasi la seule qu'une famille de sang bleu ait le droit d'exercer). De là à se sentir un peu aristocrate, il n'y a qu'un pas : dangereux à franchir, ainsi que l'apprendront certains à leurs dépens. Ce sont les femmes, une fois de plus, qui règnent sur ce petit monde, qui en assurent en tout cas la cohésion - tandis que certains de ces messieurs, emportés par leurs rêves, sont prêts à commettre toutes les folies.
Les Busson sont des gens sérieux, fiers de leur travail et d'être ce qu'ils sont ; des gens tourmentés aussi, ouverts aux idées nouvelles. Chacun dans la tribu ira son chemin, et l'un d'eux même ira loin : Robert, tôt monté à Paris, séducteur et volontiers crapule, agioteur dans la mouvance du duc d'Orléans (le futur Philippe-Egalité). Il échappera à la guillotine, fuira à Londres où il exploitera sans honte la misère des émigrés, finira par se faire appeler Busson du Maurier (du nom d'un vague lieu-dit propriété de la famille)...
Avant de retourner au pays pour des retrouvailles difficiles. Peu de romanciers français, depuis le Balzac des Chouans (et en mettant à part l'oeuvre si singulière de Robert Margerit), auront su rendre d'aussi trouble et complexe façon le climat de la France sous la Révolution. Sans doute fallait-il à cela une certaine prise de distance : Anglaise de naissance et d'éducation, mais secrètement Française par le coeur, Daphné Du Maurier aura su se placer d'emblée au bon carrefour celui où l'oreille aux aguets parvient à déchiffrer l'incompréhensible confusion des existences, ces condensés " de bruit et de fureur ".