«Je ne suis pas Jacques Renaud ; je ne reconnais rien ici de ce qui a été à lui. Un moment, oui, en vous écoutant parler, je me suis confondu avec lui. Je vous demande pardon. Mais, voyez-vous pour un homme sans mémoire, un passé tout entier, c'est trop lourd à endosser en une seule fois. Si vous voulez me faire plaisir, pas seulement me faire plaisir, me faire du bien, vous me permettriez de retourner à l'asile. Je plantais des salades, je cirais les parquets. Les jours passaient... Mais même au bout de dix-huit ans - une autre moitié exactement de ma vie - ils n'étaient pas parvenus, en s'ajoutant les uns aux autres, à faire cette chose dévorante que vous appelez un passé.»
Médée a choisi Jason. Pour lui, elle a trahi son père et tué son frère. Mais les chants de joie qui lui parviennent célèbrent le mariage de Créuse, la fille du roi de Corinthe, et de... Jason.Quand Médée l'apprend, elle «accouche» d'une telle haine que la pièce ne peut s'achever que dans une flamboyante apocalypse...TOUT POUR COMPRENDRE- Notes lexicales- Biographie de l'auteur- Contexte littéraire - Sources et réception de l'oeuvre- Pour mieux interpréter- ChronologieTOUT POUR RÉUSSIR- Questions sur l'oeuvre- Lecture de l'imageGROUPEMENTS DE TEXTES- Les héroïnes antiques de Jean Anouilh- Médée, une figure entre continuité et renouvellement- Mettre en scène Jean AnouilhCAHIER ICONOGRAPHIQUE.
Blessé lors de la Première Guerre mondiale, Gaston a perdu la mémoire et vit depuis des années dans un asile où on l'emploie comme jardinier. Alors que plusieurs familles revendiquent sa filiation, Gaston se trouve confronté à des êtres qui tentent de ranimer sa mémoire en lui montrant des objets, en lui racontant des anecdotes de son passé. Le voile opaque de l'amnésie se déchire peu à peu, lui dévoilant l'enfant qu'il aurait été, mais dont la personnalité lui déplaît fortement...Cette pièce de 1937, qui marque une étape décisive dans l'oeuvre d'Anouilh, au regard de la critique comme à ses propres yeux, pose la question de la fuite de l'individu : peut-on s'affranchir du passé, être «sans bagage» et se délivrer ainsi du poids de sa propre histoire ?
«Jeanne- Messire saint Michel! sainte Marguerite! sainte Catherine! vous avez beau être muets maintenant, je ne suis née que du jour où vous m'avez parlé. Je n'ai vécu que du jour où j'ai fait ce que vous m'avez dit de faire, à cheval, une épée à la main! C'est celle-là, ce n'est que celle-là, Jeanne! Pas l'autre, qui va bouffir, blêmir et radoter dans son couvent - ou bien trouver son petit confort - délivrée... Pas l'autre qui va s'habituer à vivre...»
«Que dire de Sylvia ? Elle n'est pas romanesque, elle est tendre, elle n'est pas naïve, elle est bonne, elle n'est pas dure, elle est nette. Les belles dames de la cour ni le prince ne l'éblouissent. Elle sait tout, depuis toujours, sans avoir jamais rien appris. Elle a la plus juste mesure du coeur. Dans ce petit univers frelaté et ricanant sous ses soies, ses cailloux précieux, ses aigrettes - elle est seule, claire et nue sous sa petite robe de toile, et elle les regarde toute droite et silencieuse s'agiter et comploter autour d'elle. Et tout ce qui faisait la force et le plaisir du prince est entre ses mains, soudain - inutile. Sylvia est une petite âme inaccessible qui le regarde à mille lieues de lui et le trouble.»
«Pourquoi n'écris-tu plus de pièces?»M'a demandé Nicolas tout de go,Moi qui me crois Victor Hugo,Oeuvrant, face à la mer dans ma petite pièce,Sur son rocher de Guernesey(La conjoncture politiqueRappelant, par ailleurs, le règne de la trique),Je réponds, supérieur:«Non, vois-tu, cet été,J'ai décidé(J'ai l'air badin et amusé -Ça me va bien) que j'écrirais plutôt des fables.»«Tu m'en montres une?» - «Elles ne sont pas pour enfants.»
«Gustave, ta mère t'a confié à moi. Je t'ai admis dans notre association comme aide-rabatteur. Tu as vingt ans. Tu es ambitieux, c'est bien. Moi aussi, j'étais ambitieux à ton âge. Mais attention ! Dans notre carrière, comme dans toutes les carrières, il y a une hiérarchie à suivre. Hector est un des meilleurs séducteurs professionnels que je connaisse sur la place de Paris. C'est un homme qui ne rate pas une femme sur trois... et permets-moi de te dire que c'est joli, comme moyenne. Tu n'as tout de même pas l'intention, toi, un apprenti, de faire du meilleur ouvrage, non oe»
Peu d'oeuvres ont été aussi mal jugées que celle d'Anouilh. Plusieurs raisons à cela : cinquante ans de succès public, ce qui ne se pardonne pas ; un anti-conformisme social, politique et culturel dont on a fait un délit d'opinion ; la célébrité d'Antigone, qui est l'arbre qui dispense d'aller faire un tour en forêt ; le recours, enfin, à des formes (farce, drame, tragédie, toutes les sortes de comédie), à des procédés (agilité technique, structures ingénieuses, répliques brillantes) et souvent à une tradition (duchesses et généraux, sofas et bergères, Toto et Marie-Christine) qui, associés, forment la façade et dissimulent la vraie nature de ce théâtre essentiellement poétique. Les rituels sociaux y cachent des vertiges, les rires soudains y sont la politesse de désespoirs durables. « Sous [s]on petit chapeau d'Arlequin », Anouilh cache une « grande oreille de janséniste ». Quels que soient le cadre (mythologique, historique, contemporain) et la tonalité (rose, noire, grinçante.) de ses pièces, les mêmes questions sont présentes : l'identité, l'impossible relation à autrui, la douleur née des compromissions, la nostalgie de la pureté, l'irrémissibilité du temps. Il est aussi difficile d'être en bons termes avec soi - « Je suis rentré en moi-même plusieurs fois. Seulement, voilà, il n'y avait personne » - que de connaître autrui : « Quel monde incompréhensible, les autres... » Bref, si « les autres » ne sont pas exactement « l'enfer », les pièces d'Anouilh ont souvent la tension d'un huis clos, et l'auteur de Becket est bel et bien, à sa manière, un dramaturge de l'existence. Humulus le muet - L'Hermine - Y' avait un prisonnier - Le Voyageur sans bagage - La Sauvage - Le bal des voleurs - Léocadia - Le rendez-vous de Senlis - Eurydice - Antigone - L'invitation au château - Épisode de la vie d'un auteur - Ardèle ou La marguerite - La Répétition ou L'amour puni - Colombe - La Valse des toréadors - Cécile ou L'école des pères. Appendices : Mystère de la Nativité - Autour du théâtre - Sur le théâtre (1926-1952)
Ce volume contient :
L'Alouette.
Becket ou L'honneur de Dieu.
La foire d'empoigne.
Julien : Colombe, mon chéri, je n'ai que toi au monde. Tu sais que je vais crever de te quitter, mais tu sais aussi que tu ne pourrais plus m'aimer si je faisais quelque chose de laid pour te garder.Colombe : Quelle idée, mon chéri ! Je pourrais très bien t'aimer quand même, moi...
Peu d'oeuvres ont été aussi mal jugées que celle d'Anouilh. Plusieurs raisons à cela : cinquante ans de succès public, ce qui ne se pardonne pas ; un anti-conformisme social, politique et culturel dont on a fait un délit d'opinion ; la célébrité d'Antigone, qui est l'arbre qui dispense d'aller faire un tour en forêt ; le recours, enfin, à des formes (farce, drame, tragédie, toutes les sortes de comédie), à des procédés (agilité technique, structures ingénieuses, répliques brillantes) et souvent à une tradition (duchesses et généraux, sofas et bergères, Toto et Marie-Christine) qui, associés, forment la façade et dissimulent la vraie nature de ce théâtre essentiellement poétique. Les rituels sociaux y cachent des vertiges, les rires soudains y sont la politesse de désespoirs durables. « Sous [s]on petit chapeau d'Arlequin », Anouilh cache une « grande oreille de janséniste ». Quels que soient le cadre (mythologique, historique, contemporain) et la tonalité (rose, noire, grinçante.) de ses pièces, les mêmes questions sont présentes : l'identité, l'impossible relation à autrui, la douleur née des compromissions, la nostalgie de la pureté, l'irrémissibilité du temps. Il est aussi difficile d'être en bons termes avec soi - « Je suis rentré en moi-même plusieurs fois. Seulement, voilà, il n'y avait personne » - que de connaître autrui : « Quel monde incompréhensible, les autres... » Bref, si « les autres » ne sont pas exactement « l'enfer », les pièces d'Anouilh ont souvent la tension d'un huis clos, et l'auteur de Becket est bel et bien, à sa manière, un dramaturge de l'existence.
Nouvelle édition en 2018
Ce volume contient:
Tu étais si gentil quand tu étais petit.
L'Arrestation.
Le Scénario.
Tu étais si gentil quand tu étais petit, L'Arrestation, Le Scénario : les intrigues, les lieux, les époques diffèrent. Chacune de ces pièces reflète l'auteur comme un miroir renvoie, selon les heures et les saisons, les images changeantes d'un même visage. C'est pourquoi elles sont secrètes. Jean Anouilh se révèle ici presque dépouillé des masques comiques ou tragiques derrière lesquels il tente de protéger sa vérité. Ces Pièces secrètes doivent être déchiffrées dans le silence et la solitude. C'est peut-être pourquoi Jean Anouilh, parlant d'elles, a dit, dans un rire gentil : Mes fours...
"Si je deviens archevêque, je ne pourrai plus être votre ami." Le roi Henri II Plantagenêt n'a pas voulu entendre l'avertissement de Thomas Becket, son plus fidèle complice et son conseiller, et l'a nommé archevêque de Cantorbéry.
Dans l'Angleterre du XIIe siècle, le pouvoir royal et le pouvoir ecclésiastique, incarnés par ces deux personnalités, vont alors se heurter. La trame historique sur laquelle se fonde ce drame confère aux grands thèmes anouilhiens de l'amitié trahie et de la solitude de l'être une résonance neuve. Becket ou l'Honneur de Dieu, pièce classique selon le principe de la tragédie qui situait dans les cours antiques les crises d'âme et de valeurs, est aussi, par son cadre et ses enjeux, la plus shakespearienne de son auteur.
«Dans son registre, Jean Anouilh a montré un talent exceptionnel, une maîtrise remarquable du dialogue, des situations et des personnages, une virtuosité et une acuité qui font de lui l'un des plus éminents auteurs du siècle.» Philippe Tesson.
Deux pièces sur le thème de la jalousie. Orphée, violoniste, et Eurydice, comédienne en tournée, quittent tout pour accomplir leur amour. Mais la jalousie s'empare d'Orphée... Dans le second drame, Frédéric s'éprend de Jeannette, la soeur de sa fiancée. Mais sa passion de l'absolu viendra contrarier son amour. Comment le dénouement de ces deux pièces pourrait-il être autrement que noir ? Elles disent l'exigence de la grandeur, de la beauté, de l'éternité, dans un monde éphémère, mesquin, voué aux compromis.
«L'Antigone de Sophocle, lue et relue et que je connaissais par coeur depuis toujours, a été un choc pour moi pendant la guerre, le jour des petites affiches rouges. Je l'ai réécrite à ma façon, avec la résonance de la tragédie que nous étions alors en train de vivre.
Oedipe roi, relu il y a quelques temps par hasard comme tous les classiques, quand je passe devant mes rayons de livres et que j'en cueille un, m'a ébloui une fois de plus - moi qui n'ai jamais pu lire un roman policier jusqu'au bout. Ce qui était beau du temps des Grecs et qui est beau encore, c'est de connaître d'avance le dénouement. C'est ça, le vrai "suspense"...
Et je me suis glissé dans la tragédie de Sophocle comme un voleur - mais un voleur scrupuleux et amoureux de son butin».
Jean Anouilh.
Dans un château, vers 1900, un bal va servir de cadre au traquenard tendu par Horace, jeune homme cynique et amer, car Diana, dont il est secrètement épris, semble lui préférer Frédéric, son propre frère jumeau. Il décide de convier à la soirée une jeune et gracieuse danseuse de l'Opéra, qui aura pour seule mission de séduire ce dernier et de le détourner de Diana. L'Invitation au château (1947), pièce noire déguisée en rose, renoue avec la tradition de la comédie d'intrigue, issue du théâtre latin et italien et des Fourberies de Scapin. En choisissant de mettre en scène des jumeaux, à la suite de Plaute, Shakespeare et Goldoni, Anouilh élabore un jeu dramatique, alerte et complexe, mené par Horace, dont le sombre dessein ne cesse de se heurter au ballet tourbillonnant des autres personnages.
«Pourquoi es-tu entré ? Je ne veux pas te voir. Je suis heureuse ici, tu entends. Je suis heureuse et je l'aime. Je ne veux plus avoir affaire avec ta peine et ta misère. Je l'aime, tu entends, Gosta ; je l'aime... Qu'est-ce que tu es venu faire ici, avec ton malheur à bout de bras ? Et d'abord, pourquoi te permets-tu de sourir quand je te dis que je l'aime et que je suis heureuse ? Tu es laid, Gosta, tu es vieux, tu es paresseux. Tu disais toujours que tu aurais pu faire mieux que les autres, mais tu n'as jamais rien fait...»
Ce volume contient : L'Hurluberlu ou le Réactionnaire amoureux (1956), La Grotte (1960), L'Orchestre (1957), Le Boulanger, la Boulangère et le Petit Mitron (1966) et Les Poissons rouges ou Mon père, ce héros (1968).
Paris, années 1900. Dans les sous-sols d'une maison bourgeoise, la cuisinière a été poignardée. Qui a tué Marie-Jeanne ? Un commissaire mène l'enquête.Ce pourrait être une comédie policière réussie. Mais, dès le premier acte, l'auteur s'excuse auprès des spectateurs : la pièce n'est pas composée... elle s'écrira devant eux !Pis, tandis que la représentation progresse, l'auteur refuse de montrer sur scène le destin infâme de ses personnages. C'en est trop, les protagonistes se révoltent : s'ils ne peuvent tout dire, ils préfèrent ne pas exister. Dans ces conditions, le commissaire pourra-t-il élucider le crime et l'auteur achever son oeuvre ?Pièce dans la pièce, La Grotte exhibe la machine théâtrale et bafoue l'illusion dramatique. Défiant les conventions du genre, Anouilh dévoile les affres de la création et de la représentation.L'édition- Groupement de textes : les résonances littéraires de la pièce (l'allégorie de la caverne,le théâtre dans le théâtre)- Du texte à sa représentation : la mise en scène d'Yvan Garouel au Lucernaire en 1997 (interview exclusive, note de mise en scène et photos de la représentation)
Humulus le Muet et le Bal des voleurs : deux pièces courtes et drôles qui permettent de découvrir l'oeuvre du grand dramaturge Jean Anouilh. Les élèves dénoueront, avec ces deux pièces, toutes les ficelles du texte dramatique comique !
Les pièces roses d'Anouilh sont recommandées dans les nouveaux programmes de français pour la classe de 4e, "Théâtre : faire rire, émouvoir, faire pleurer".
Écrite en 1934, mais montée seulement en 1938 après le succès du Voyageur sans bagage et publiée la même année dans Les oeuvres libres avant de figurer dans le recueil des Pièces noires, La Sauvage, aux yeux de la critique, confirmait le talent du jeune Anouilh. Souillée dès son plus jeune âge, Thérèse, la jeune violoniste d'un minable orchestre de province, ne parvient pas à accepter l'amour, l'argent et la famille du brillant pianiste Florent. Solitude, honte, poids du passé, solidarité de la misère et de la déchéance, impossible pureté, mythe du bonheur, achèvent de mettre en place les éléments récurrents d'un univers dramatique original. En soeurs cadettes de Thérèse, Antigone et Jeanne (L'Alouette) obéiront à la même exigence en refusant toute compromission.
«Tu ne peux pas savoir ce que c'est que d'avoir un copain qui est plus beau que vous, plus malin que vous à l'école et qui, après, devient riche par-dessus le marché ! C'est cela qui doit être beau dans les révolutions, tu vois, même si on s'en fout comme moi, voir crever ceux qui étaient heureux !»