Dans ses spectacles, Danis expérimente les nouvelles technologies et interroge la dimension de l'espace. Ces recherches se manifestent aussi dans son écriture.
Le recueil La Trilogie des flous nous invite à un voyage à travers ses rêves et ses cauchemars. Avec l'invention de ce qu'il appelle " l'écriture en 3D ", l'auteur crée un univers visuel riche en sensations. Par bribes, il livre des histoires pleines de vie où le langage se crée progressivement, pour finalement laisser place à la poésie de l'ellipse et à la beauté du silence. On découvre entre autres, la renaissance fantastique d'un aviateur, un amour impossible entre un caïd de la mafia et une femme mystérieuse, une société brisée à travers mille voix venues d'ailleurs, le sort malheureux de cinq femmes dans un orphelinat d'Haïti...
Difficile de ne pas se laisser envoûter par la magie de ces récits oniriques.
Lucia Perreault travaille nuit et jour à une grande tapisserie que son galcriste, Taumako, lui a commandée. Au fur et à mesure que les fils s'entrecroisent sur son métier, l'artiste déroule celui de l'histoire. De son histoire. Jusqu'à ce que des maux de tête lui mettent la puce à l'oreille et que l'Araignée l'attrape dans sa toile. Ce polar onirique de Daniel Danis élucide le terrible secret des orphelines de Mars, mystérieusement reliées depuis leur enfance et sujettes aux mêmes troubles de la personnalité.
J'entre dans une allée de viande. Je suis une madame, je fais semblant d'être sa fille. Tous mes yeux sont rivés sur un morceau de viande. Je le pique, aussi vite qu'un taon. Hop! Sous le manteau. Je marche avec la tremblote. J'ai l'air d'une petite fille enceinte. Ça me donne le fou rire, surtout quand je regarde derrière moi et que je vois des gouttes de sang tomber du dessous de mon menteau. Je veux courir, mais je ris de trop d'excitement.
Cardamone est un conte cruel traversé de magie, de poésie et de réalisme.
Il y est question de déplacement et de survie des mineurs en zone de conflits, d'entraide et de résilience.
Il s'agit de réparer l'enfance abîmée, empruntant le sentier où les mots grouillent et bouillonnent, pour métamorphoser une enfance perdue et s'acheminer vers l'âge adulte.
En vingt-quatre images, vingt-quatre instantanés incisifs, se déroule l'histoire rouge sang de trois êtres sculptés dans la tragédie : une femme qui avait soif, son fils qui aimait rire, un vieux qui les regardait sans pouvoir rien dire.
une famille est sur le point de se faire expulser.
elle charge le plus jeune des fils, bled, de trouver une nouvelle demeure. l'enfant part donc en mission, seul, avec pour unique lien entre lui et les siens un téléphone mobile, volé à l'un de ses frères. bled est un petit poucet moderne, qui s'en sort à la force de ses rêves. seul, à la rencontre du monde, il se crée des compagnons avec qui il dialogue, avec qui il chemine. il parle fort pour rompre le silence, vaincre sa peur et retrouver le chemin de la maison.
dans sa cour, j'il s'est endormi dans les bras d'un bosquet.
des jours entiers, les soldats azzédiens anxieux viraillent dans la cour à écouter rhinos, les oreilles sur les charbons ardents, négocier les accords ce paix à voix haute dans sa main-téléphone.
derrière les volets bleus ajourés, romane voit tout par les découpés de son masque de cuir.
L'histoire raconte l'amitié immense entre deux enfants de clans adverses.
Lirane, 8 ans, vit en Israël. Juste de l'autre côté de la frontière, habite Ferhat, jeune Palestinien de 11 ans. Tout commence à cause de l'eau. Lirane est à s'amuser avec sa poupée Hannah. Jouant à éteindre un feu imaginaire avec de l'eau en bouteille, elle lance un " Au secours ! " qui alerte Ferhat, qui déboule la colline. Le garçon est outré de constater tout ce gaspillage d'eau, alors que dans son village de tentes, il n'y en a plus depuis des mois.
Plusieurs rencontres suivront où les enfants se prendront d'une amitié profonde malgré le passé sociopolitique qui les différencie.
C'est dans le pardon et la recherche de compassion que Lirane et Ferhat apprendront le respect du vivant et viendront à réinventer leur destinée.
" Je veux être comme toi.. Je suis faite de terre aussi. Je ne veux plus de jouets, je veux attendre la pluie pour m'amuser à me laver... ".
La Scaphandrière raconte l'histoire de Pierre et Philomène, qui vivent près d'un lac de pêcheurs de perles. Le lac, surnommé " Le Loque ", a englouti leur père puis leur mère, et menace à son tour Philomène, devenue chercheuse de trésors d'épaves. Pierre-Aimé et Philomène deviennent les passeurs d'une histoire familiale échouée dans la sombre réalité de la disparition.
Dans L'Enfant lunaire, nous retrouvons également l'univers du conte où la nature façonne les êtres et modèle leur langue. Au centième étage d'un immeuble, une mère a donné naissance à Nocturne, qui s'est créé son propre univers féerique dans le chant des grenouilles.
Mais sous une dictature militaire, il n'est pas permis de croire en ses rêves, même pour un enfant.
Daniel Danis dit lui-même, au sujet de son écriture : " Quand j'écris, ma main est séparée du reste du corps, qui lui, avec ma tête, est ailleurs, dans une expérience de vie ancienne et profonde. Les images s'imposent toutes seules, de même que les syncopes, les ellipses et les trous qui les séparent. "
Trois frères et une soeur, deux fois orphelins après la disparition de leurs parents adoptifs, traversés par un éclair une nuit d'orage, ont hérité d'une cabane branlante et d'une étrange machine : le Dire-Dire, une sorte de cornet en cuivre où chacun déverse ses peines et ses joies. Organisés en tribu, ils refusent toute intrusion sur leurs terres, soudés entre eux par une « Société d'Amour ». Partie à la conquête des villes en chantant, leur soeur revient bientôt, défaite, la voix perdue, les membres sans mouvements. Commence une course aussi vaine qu'affolée pour lui redonner vie.
Sur l'île de Mahaguïrdok, il y a les femmes et leurs pieds mutilés, harnachés de sabots à clochettes ; tradition que les Anciens refusent d'abandonner. Fleurée et Gabié, amoureux et rétifs, s'insurgent contre la barbarie. Collyre, l'ami d'enfance, aveuglé par sa soif de pouvoir, mène la révolte avec force, jusqu'à la mort. Ainsi, la légende, cruelle et magnifique, transfigure un symbole d'oppression en promesse d'avenir, une légende pétrie de poésie violente que Daniel Danis, après Cendres de Cailloux et Celle-là, semble puiser au plus profond de lui-même.